Guyane
En librairie le 19 avril 2024
Après le meurtre de son neveu tant aimé, Antoine-Michel, un homme mûr, est condamné à la déportation au bagne de Saint-Laurent-du-Maroni. Arrivé dans ce nouveau territoire, totalement étranger à sa Corse, la Guyane, il vit sa condamnation dans une forme de limbes entre rêve et réalité. Dans ce lieu hors du monde, la véritable douleur est l’exil, plus que celle de la condamnation carcérale. Là-bas il croise d’affreux criminels et fréquente, seule part d’humanité, les indigènes de la forêt. Au soir de sa vie, il rencontre Marie, une ancienne communarde avec qui il construira un amour rédempteur et élaborera une tentative d’évasion.
Gilles Zerlini vit à Bastia. Il est l’auteur de Mauvaises nouvelles (2012), de Chutes (2016) et de Sainte Julie de Corse et autres nouvelles (2019) parus aux éditions Materia Scritta. Après Épuration et Lettre à mes fantômes, parus en 2021 et 2022 aux Éditions Maurice Nadeau, l’auteur met en scène un nouvel épisode dramatique de son histoire familiale.
Coll. Lettres Nouvelles, ISBN 978-2-86231-549-2 160 p. 19 €
Extrait
EXTRAIT 1 - En Corse
« ?Les hommes qui vivent ici sont mouvants, ils se déplacent comme la brise, comme les nuages et les saisons. Ils sont faits de rien, de terre, bois, pierre de poussière et de désert. Ils parcourent en permanence ce vide, sans pour autant parvenir à l’occuper en entier.
Désert végétal et minéral confus. Qui de la pierre ou de l’homme est apparu en premier, qui a modelé l’autre ? Je n’en sais rien. Rien n’a bougé ici depuis la Genèse. Chacun chez soi et Dieu ? Dieu pour tous.
Il y a, posées çà et là, ces boules de granite. Elles sont comme des monstres figés, calmes et somnolents, comme des bêtes qui attendent. Nous les connaissons toutes, les plus belles ont des noms.
Je te dois ici quelques mots pour que tu saisisses pourquoi sont parsemés ces ossuaires à ciel ouvert. Ce sont les os blanchis des victimes d’un génocide presque oublié. Il me déplaît de te relater cela, ces histoires-là, ce ne sont pas des choses qui s’écrivent, elles râpent ma gorge comme une obscénité, comme les mots d’une trahison, comme un âcre tabou, mais comment te le dire autrement que par l’écrit ? »
EXTRAIT 2 - En Guyane
« ?De temps en temps au hasard des rencontres, on a quelque peu de réconfort lorsque l’on parle avec un pays. Il y en a beaucoup, voleurs, assassins, escrocs, souteneurs. Chez les gardiens aussi. Ça permet de discuter un peu, d’avoir quelques nouvelles. Les Corses arrivent de partout, directement de l’île comme moi, mais aussi de Marseille, Toulon et Paris. Il y en a qui ont été déjà condamnés, c’est leur second voyage là-bas. Eux, leur parole vaut de l’or, ils nous disent comment s’en sortir, la vie au pénitencier, les pièges à éviter, les blessures, les maladies, la débrouille. Ils sont particulièrement interrogés par ceux qui veulent se faire la belle dès leur arrivée. Moi ce n’est plus de mon âge, enfin nous verrons. Certains cachent leur argent, quelques outils, en leur fondement dans une espèce de tube de bois de la taille d’un saucisson, c’est inouï. »
En savoir plus...
"Guyane est plus qu'un récit d'aventure et d'évasion. C'est une réflexion profonde sur la condition humaine, où les thèmes de la fatalité, de la culpabilité, de la quête de rédemption, de l'amour et de la liberté s'entremêlent. L'auteur nous interroge sur le poids du passé, les traditions ancestrales et la violence qui gangrène la société corse. Le récit, bien qu'ancré dans un contexte historique précis, résonne avec une force inattendue dans la Corse contemporaine, où la violence et la corruption continuent de marquer les esprits." Selon Raphaël Graaf dans Mare Nostrum en Aôut 2024. https://marenostrum.pm/gilles-zerlini-ressuscite-le-bagne-dans-guyane/1900600-30/
La qualité de l'écriture est saluée par la critique: " Une écriture originale, affective, charnelle, entrelace mots corses et français, traduit avec subtilité la distanciation du héros pour son sort. Il reste dans son pays intérieur, entre rêve et réalité : ainsi il peut affronter avec résignation ces années d’expiation, accueillir une renaissance inespérée. Souvent, l’auteur établit un dialogue avec son personnage : dans un présent difficile, il restitue la poursuite d’un passé lancinant dont il reste un acteur absent et imaginatif. Le livre émeut et parfois subjugue le lecteur." Dans Les www.les-notes.fr : https://www.les-notes.fr/analyse/guyane/
Dans ce livre, plus que la souffrance physique des bagnards, c'est leur souffrance mentale, la souffrance d'être arrachés aux siens qu'évoque Gilles Zerlini. « À la base de ce roman, une colère, une injustice qui fait commettre l'irréparable à Antoine Michel Ferracci sur son neveu qu'il adore pourtant. J'ai voulu montrer deux facettes de notre société. Celle d'un oncle aux valeurs très fortes, aux vertus ancestrales, et celle de la nouvelle génération, celle de Noël, le neveu, qui ne pense qu'à l'argent. Dans ce livre j'ai voulu monter la souffrance intérieure, la destruction des repères. On n'est ni dans Papillon ni Au Bagne d'Albert Londres ». Gilles Zerlini sur les traces d'un de ses ancêtres au bagne de Guyane 19 Avril 2024 www.corsenetinfos.corsica p. 2/2
"Dans la catégorie livre corse, c'est sans hésitation que je vais me tourner vers Gilles Zerlini. Ses ouvrages sont tous plus saisissants les uns que les autres, et le dernier
paru, Guyane, confirme cette tendance. C'est un livre frappant, tout en étant d'une grande poésie", confie Patrick-Ange le libraire de A Fonda, à Borgo... in La Sélection des libraires, Corse-Matin du 21 juillet 2024.
Une excellente présentation de l'ouvrage de Gilles Zerlini, "Guyane" par Christian Roinat sur le site d'America Nostra : "Ah, la vendetta corse ; depuis Mérimée et même avant, elle intrigue les continentaux. Dans le village d’Antoine-Michel Ferracci vers 1880, plus que d’une vengeance, il s’agit d’une jalousie qui est à l’origine du drame, jalousie motivée par l’enrichissement excessif (vu comme tel) d’un neveu par son oncle, Antoine-Michel.
"Après un procès empêtré par les problèmes de langues, l’accusé ne comprenant pas les nuances du français officiel, il est envoyé en Guyane pour vingt ans. Il en a quarante cinq. L’idée de vendetta n’est pourtant pas absente des pensées du nouveau bagnard : il ne faudrait pas que la famille de la victime se venge sur sa femme ou ses deux enfants. Et aussi, paradoxalement, il se dit que sa condamnation l’a sauvé d’une vengeance certaine de l’autre clan." lire la suite :